Tom de Dorlodot fait la traversée de l’Atlantique en famille sur son voilier de 12 mètres, le SEARCH Projects. Il partage son expérience avec ceux qui aimeraient un jour se lancer dans l’aventure du bateau-stop ou cobaturage (l’équivalent du covoiturage mais en voilier).
Le « bateau-stop »
Le bateau-stop est une pratique assez peu connue et qui peut sembler compliquée aux premiers abords. Personnellement, je trouve que c’est une superbe manière de traverser les océans et de faire des belles rencontres. C’est aussi une façon économique de voyager et un très bon moyen de limiter son impact écologique.
J’ai croisé de nombreux bateau-stoppeurs dans les iles Canaries et au Cap Vert qui cherchaient à monter à bord d’un voilier pour traverser l’océan. Ce sont en général des jeunes entre 20 et 30 ans qui proposent leurs services en tant qu’équipier en échange d’une place (gratuite) à bord.
Nous avons eu l’occasion d’accueillir des jeunes bateau-stoppeur à bord lors de courtes traversées. Par exemple entre des iles des Canaries. C’était toujours une super expérience. Notre voilier est confortable jusqu’à 4 personnes à bord.
Pour notre traversée transatlantique, nous avons accueilli deux amis à bord. Julien est réalisateur (pour notre émission télé EXPLORE) et Aurian est ostéopathe (super en cas de petit soucis de santé).
Des avantages partagés
Faire du bateau-stop n’est pas si compliqué mais il faut savoir dans quoi on se lance et bien se préparer. De nos jours, la plupart des voiliers sont très bien équipés pour les longues traversées. Ils sont munis d’outil de navigation par satellite, un radar et un système d’alerte automatique. Cependant, ces outils ne sont pas infaillibles. Faire en sorte qu’il y ait en permanence quelqu’un à l’extérieur, dans le cockpit, même en pleine nuit, est un facteur élémentaire de sécurité en mer.
S’il y a plusieurs personnes à bord il est possible de s’organiser pour s’alterner sur le pont. Pendant que les autres dorment, se reposent ou cuisinent, il y a toujours quelqu’un qui veille. C’est surtout pour cette raison que les propriétaires de voilier accueillent des équipiers à bord. Lorsque je voyage en solitaire, je dors par tranche de 15 min pour veiller. C’est franchement fatiguant. Du coup, prendre des équipiers peut vraiment améliorer la qualité de vie à bord.
Quant aux bateau-stoppeurs, ceux-ci profitent du voyage pour se rendre à leur prochaine escale et ils partagent une expérience inoubliable.
Ce que chaque bateau-stoppeur doit savoir
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L’espace disponible et le travail d’équipe
Sur un voilier, l’espace est restreint. Le fonctionnement d’un bateau repose sur un travail d’équipe. Les traversées océaniques prennent plusieurs semaines et on ne peut pas débarquer à tout moment. Le plus important c’est la bonne entente entre les membres d’équipage, sans quoi l’expérience peut virer au cauchemar. Un bon équipier reste positif dans les coups durs et est capable d’arrondir les angles. Il faut être ouvert d’esprit et avoir un bon sens du relationnel. Je conseille de passer un peu de temps avec le capitaine pour apprendre à le connaître avant de se lancer dans une aventure qui durera probablement plusieurs semaines.
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L’aide sur le bateau
Une expérience n’est pas absolument indispensable pour monter en tant qu’équipier sur un voilier. Les tâches confiées à un équipier non expérimenté sont assez simples. Il est tout de même impératif de connaître quelques nœuds de base : Les nœuds d’amarrage, le nœud de chaise et le nœud de cabestan.
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Le vocabulaire de base
Il est important de connaître le vocabulaire de base. Chaque chose à bord a un nom spécifique. Apprendre les termes techniques est une excellente idée. Cela permet à l’équipier de comprendre les consignes précises du capitaine. Voici les plus utilisés : tribord, bâbord, hisser, étarquer, lofer, abattre, la grand-voile, le foc, le patara, la drisse, la bôme…
Cliquez ici pour consulter un lexique de la navigation en français, et ici pour le lexique en anglais. -
Le mal de mer
Le mal de mer est parfois difficile à gérer. On peut y être plus ou moins sujet et généralement cela passe après trois ou quatre jours en mer. Avant de se lancer dans une grande traversée, mieux vaut faire un peu de voile pour voir comment on réagit. Si vous êtes déjà malade en voiture ou en bus, il est probable que vous soyez aussi malade en mer. Demandez conseil à votre médecin pour qu’il vous prescrive des médicaments contre le mal de mer si vous y êtes sensible.
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L’équipement du bateau-stoppeur
Il faut monter à bord avec l’équipement indispensable. Prévoyez au minimum :
- Des chaussures de pont légères ou mieux, des bottes de pont (bottes de mer). Il faut impérativement porter des chaussures à bord. Il y a pleins d’obstacles sur le pont et on peut se blesser rapidement en se déplaçant pieds nus.
- Un pantalon imperméable.
- Une veste imperméable. Idéalement avec une capuche de couleur vive et des réflecteurs qui seront essentiels en cas de chute en mer.
- Des lunettes de soleil.
- Une casquette.
- De la crème solaire (idéalement une crème qui n’abime pas la vie marine)
- Un sac de couchage.
- Une lampe de poche frontale et des piles de rechange.
- Des vêtements chauds.
- De bons livres.
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La sécurité
Traverser l’océan à la voile est une aventure sérieuse. Il faut s’assurer que le voyage se fera en toute sécurité. Pour cela, il faut chercher à connaitre l’état général du bateau, son équipement et s’assurer du professionnalisme du capitaine.
Questions à poser au capitaine
Voici quelques précautions à prendre et quelques questions à poser au capitaine avant de monter à bord.
- Quelle expérience a le chef de bord ? A-t-il déjà fait une telle traversée ?
- Demandez à visiter le bateau. Est-il propre et en bon état ? Est-il bien entretenu ? Tout fonctionne-t-il ?
- Quels sont les équipements de sécurité ? Ont-ils été vérifiés ?
- Y a-t-il un pilote automatique à bord ?
- Le chef de bord a-t-il de l’expérience en premiers soins et il y a-t-il une bonne pharmacie à bord ?
Bien choisir son bateau-stoppeur
Vous êtes le capitaine ? Voici quelques règles à ne pas oublier avant d’accueillir un bateau-stoppeur à bord.
Le capitaine est responsable de son équipage, c’est pourquoi il est primordial de bien choisir qui monte à bord. En général le capitaine fonctionne au feeling. Il faut être prudent et pour les longues traversées s’assurer que l’hôte va bien se comporter et qu’il sait dans quoi il s’engage. Le capitaine peut être poursuivi en cas d’accident et de négligence (responsabilité civile). Il doit donc être correctement assuré. C’est pourquoi il devra s’assurer que l’équipier suivra toutes les instructions. On peut accepter à bord des mineurs accompagnés. Il n’y a pas de test d’aptitude à faire passer mais cela vaut le coup de faire une première navigation d’une journée pour s’assurer que cela va bien se passer.
L’équipement à bord
Même sur un bateau bien préparé et bien que le risque soit faible, il arrive que des choses cassent ou tombent en panne. Un voilier doit donc être équipé de kits de réparation et de pièces de rechange pour y parer.
En cas d’avaries graves et de naufrage et conformément à la loi, un équipement de sécurité complet et très précis doit se trouver à bord.
Il doit y avoir un bateau de sauvetage, un kit de survie, une radio VHF fixe et une portable, une balise de localisation type Garmin Inreach. Nous avons également des balises AIS personnelles sur nos gilets de sauvetage. Je le conseil vivement.
Nous avons également préparé un « grab bag » à emmener dans le bateau de sauvetage avec un panneau solaire, de l’eau, une couverture de survie, un kit pêche, de la nourriture, de la crème solaire, et des fusées de détresse.
L’une des pires situations est celle d’un homme à la mer. N’importe quel chef de bord doit être entrainé à cette éventualité et l’équipage doit être briefé avant le départ. Ce type d’accident est presque toujours dû à de la négligence. Il y a des règles claires à adopter.
Les voiliers et catamarans sont munis de filière de sécurité, mais aussi d’une « ligne de vie », sur laquelle on « clippe » une longe reliée à son gilet de sauvetage. Avec ce système on est accroché au bateau et le risque de tomber à la mer est nettement moins grand. L’idéal est d’être constamment attaché lorsqu’on sort sur le pont. Je conseille à mes équipiers d’utiliser les toilettes du bateau plutôt que de se pencher par-dessus bord. Dans la plupart des cas c’est comme cela que les gens tombent à l’eau !
Le bateau-stop: une super aventure
Vous aurez compris que le bateau-stop est une super expérience, mais qu’il faut approcher avec sérieux et une bonne préparation. L’expérience sera d’autant plus belle.
N’oubliez pas non plus partir avec une bonne assistance voyage. 😉
Vous pourrez trouver des capitaines à la recherche d’équipiers sur les sites suivants :
- https:// www.bourse-aux-equipiers.com
- https://www.findacrew.net/
- https://www.crewseekers.net/ (mais payant).
Soyez prudents, bon vent et bonne mer !
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© Photos : Tom de Dorlodot et John Stapels