Dans ce quatrième article qui relate leur périple qui les mène de Bruxelles à la Nouvelle-Zélande, nos Sixglobetruckers traversent le Turkménistan et l’Ouzbékistan.
Découvrez ci-dessous la suite de leur aventure.
Entrée en Turkménistan : notre épopée devient asiatique !
Nous quittons l’Iran pour le Turkménistan par la frontière de Badjgiran… et y sommes presque seuls à 8h du matin. De l’autre côté nous découvrons immédiatement un tout autre univers et entrons résolument en Asie centrale. Le cyrillique remplace le farsi, les produits russes remplacent les produits du Moyen-Orient, le portrait du « président » (le seul à pouvoir se présenter aux élections) remplace le portrait du Guide Suprême iranien. Les visages s’arrondissent les yeux s’allongent. Et surtout : plus de foulards ! La fouille du camion est scrupuleuse.
Ashgabat : ville blanche et dorée
Nous avions demandé un visa de transit qui permet de traverser le pays en 5 jours et commençons par Ashgabat, la capitale. Ville pimpante blanche et or, c’est la ville administrative et la vitrine du pays. Très peu de gens marchent dans les rues, les voitures avancent au pas, les seules personnes que l’on aperçoit sont en train de nettoyer quelque chose. Les femmes sont presque toutes habillées de la même façon : longues robes ajustées, souvent en velours rouge, un plastron de broderie fait le tour du col, descend jusqu’au nombril et se ferme avec une broche en argent sous le cou, elles portent des talons, une petite calotte sur la tête, et surtout deux longues nattes qui descendent de chaque côté du visage. Interdit de prendre des photos en ville, de klaxonner, de se garer sur le bas-côté, de traverser au milieu de nulle part, … un policier veille à chaque carrefour. Ce qui contribue à rendre l’ambiance très étrange est qu’il n’y a ni publicités ni enseignes, les noms des bâtiments sont écrits en lettres cyrillique dorées, toutes avec la même typographie qu’il s’agisse d’une banque, d’un musée, d’un café ou de la poste, tout se ressemble scrupuleusement. Seules des photos surexposées du président sur écran géant parsèment la ville le montrant tantôt en berger, tantôt à cheval, tantôt en militaire, etc.
Connection censurée
A peine arrivés en ville nous espérions enfin mettre à jour le blog après 40 jours de censure iranienne mais ravalons vite nos ambitions : notre hébergeur est toujours censuré et nouveauté : Whatsapp l’est également !
Voyage aux portes de l’enfer
Pour traverser le pays nous avons le choix entre deux routes : celle de l’est qui passe par Merv, une ancienne cité, étape de la route de la soie, intéressante pour son histoire ; ou celle de l’ouest qui traverse le désert du Karakoum dans lequel se trouve le cratère de Darvaza. Nous choisissons cette 2ème option plus insolite : sous l’occupation russe des puits ont été creusés pour atteindre des poches de gaz, mais suite à une erreur de manipulation l’une de ces poches s’est enflammée et brûle toujours depuis 50ans ! Désastre écologique autant que spectacle fabuleux que de voir ce cratère brûler au milieu du désert… il mérite son surnom de « portes de l’enfer ».
En contact avec la population locale
Au lendemain d’une nuit à cet endroit nous sommes invités par une famille de bergers turkmènes que nous aidons pour la découpe des peaux de leurs moutons. Pour nous remercier ils nous en offrent une et nous préparent un délicieux « plov » : le plat typique d’Asie centrale ! Du riz pilaf avec du mouton (ici confit) et quelques carottes. Délicieux ! Nous terminons la traversée du pays en faisant un bivouac à Koumia-Ourgentch, qui compte d’intéressants vestiges du 12ème siècle.
Cap sur l’Ouzbékistan
Nous passons la frontière ouzbèke sans encombre, les spécificités sont ici d’avoir une pharmacie qui respecte une liste de médicaments avec des quantités précises et de déclarer au centime près l’argent avec lequel on entre dans le pays. Une déclaration de sortie permet aux douaniers de comparer et il est interdit de ressortir avec plus d’argent qu’au départ, à moins d’en prouver la provenance. Ceci s’explique par l’importance du marché noir ouzbèke, notoirement utilisé pour son taux deux fois plus intéressant que le taux officiel. Nous changeons donc rapidement nos dollars emportés depuis Bruxelles au bazar local pour des soums à ce taux très avantageux. Il est normalement interdit d’acheter une carte Sim locale avec un passeport étranger mais cette règle semble tout aussi notoirement contournée, notre vendeur a pris la photocopie d’un autre passeport (un copain qui passait par là) pour nous vendre un nouveau numéro.
Des perles sur la route de la soie
Nous avons commencé par un pèlerinage écologique au bord de la mer d’Aral qui arrivait jadis au nord du pays mais qui suite à sa disparition progressive après une intense monoculture du coton a laissé derrière elle quelques coques de bateaux rouillés posés sur du sable. Puis nous avons visité les très belles villes de Khiva, Boukhara et Samarcande, joyaux et étapes majeures de la route de la soie. Ces trois villes font l’effet d’un goulot qui rassemble grand nombre de voyageurs reliant Europe et Asie. Ainsi, outre plusieurs groupes de touristes français, nous y avons rencontré nombre de cyclistes, motards, auto-stoppeurs, et même une famille d’anglais qui sont sur les routes depuis 4 ans avec leurs deux filles !
Soucis techniques : notre truck mis à rude épreuve
Les très mauvaises routes d’abord Turkmènes puis Ouzbèkes (ornières permanentes, souvent pas même de goudron) auront eu raison de notre pot d’échappement qui a fini par se décrocher ! Nous avons rapidement trouvé un garage camion où les mécaniciens ont commencé par tous nous inviter au restaurant avant de le ressouder. Nous en profitons pour lever notre cabine et découvrons d’autres problèmes : les amortisseurs de la cabine avant sont fichus et n’ont pu la retenir de taper sur un des compresseurs qui a fini par se fêler. Nous faisons une réparation de fortune sur le compresseur en bouchant le trou à l’aide d’une résine et gardons en tête de trouver un garage mieux achalandé en pièces pour changer les amortisseurs à l’occasion.
Tracas administratifs
Nous comptions demander nos visas russes à Tachkent, la capitale Ouzbèke, ce qui jusqu’alors ne posait aucun problème mais nous lisons et entendons qu’une nouvelle règle est passée ne permettant plus de le demander dans cette ville si l’on n’est pas résident. Nous nous rendons tout de même à l’ambassade pour vérifier l’information où l’on apprend qu’il n’y a aucun problème, en tant qu’européen on peut toujours faire la demande de visa à cet endroit ! Nous passons deux jours à rassembler et imprimer les documents : des documents à compléter en ligne pour chacun, des lettres d’invitation à commander via internet à une agence en Russie, une lettre de notre assurance voyage en anglais et spécifiant que l’assurance couvre la Russie, des réservations de tous les hôtels dans lesquels nous sommes sensé loger (nous faisons des réservations en vérifiant que nous pouvons les annuler), et les habituelles photocopies de passeports, photos, et argent en dollars. Nous avons la malchance de devoir effectuer toutes ces démarches sous la canicule qui frappe la ville : 62 degrés au soleil, jamais moins de 42 degrés à l’ombre, et 49 degrés dans le camion. Nous avons déposé les documents et fui vers la réserve naturelle avec son lac au nord de la ville en attendant le rendez-vous fixé 3 jours plus tard pour récupérer les visas. Ces démarches effectuées nous avons finalement pu prendre la route de la vallée de Fergana qui permet de rejoindre le Kirghizstan, encore a-t-il fallu s’enregistrer quelques fois dans les nombreux postes de police bien présente dans la zone.
Enregistrement du séjour obligatoire
Une dernière règle spécifique à l’Ouzbékistan nous aura finalement bien servi : le gouvernement oblige les voyageurs à s’enregistrer dans des hôtels tous les jours lorsqu’on vient en avion, il y a une tolérance d’enregistrement tous les 3 jours si on voyage avec son propre véhicule. Nous avons donc négocié tous les 3 jours de pouvoir dormir devant une auberge en ne payant que l’enregistrement et les services (douches, toilettes, cuisine parfois, wifi, machine à laver le linge).
Vivement le froid !
Etant donné que depuis l’Iran nous n’avons pas connu moins de 40°, nous avons eu assez chaud, ce système nous aura donc finalement permis d’économiser l’eau potable dans un pays où elle est difficile à trouver, tout en prenant autant de douches et faisant tourner autant de machines que nécessaires ! Nous serons quand même bien contents de trouver le frais des montagnes kirghizes et espérons avec envie le moment où nous pourrons ressortir nos pulls !
Découvrez les autres aventures des “Sixglobetruckers” sur leur site ou dans le dossier “De Bruxelles à Sydney en truck“